Boire du café, à quel prix ?

Au réveil, à la fin du repas, à la pause, en terrasse, le café est un incontournable dans le quotidien de beaucoup de Français. Rentré dans les habitudes à la maison comme au boulot, il est bien compliqué de s’en défaire pour bon nombre d’entre nous. Mais à quel prix ?

Plus de 500 tasses sont consommées chaque année par les Français, ce qui correspond à environ 3 kilogrammes de café. Pour répondre à cette demande (d’autant plus importante à l’échelle mondiale), 11 millions d’hectares de café sont aujourd’hui cultivés, principalement au Brésil, au Vietnam, en Colombie et en Indonésie. Pour cela, 25 millions de producteurs s’affairent dans plus de 80 pays, en majorité des petites exploitations familiales de moins de 5 hectares.

La culture du café mise à rudes épreuves

Classée première ressource agricole au monde (en valeur), le café connait pourtant des cours très volatils depuis la disparition du dernier Accord International du Café qui régulait les échanges mondiaux. Les revenus deviennent alors plus faibles pour les producteurs et le pouvoir se concentre dans les mains des négociants, des grandes marques internationales et des distributeurs, mettant en péril la rentabilité de la filière.

En parallèle de cela, la production de café – notamment d’Arabica – est impactée par la hausse des températures et l’irrégularité des précipitations liées au climat déréglé. Selon les prévisions, sans action forte pour lutter contre le changement climatique, la superficie dédiée à la culture de café diminuerait de moitié d’ici 2050, ne permettant plus de répondre à la demande de café au niveau mondial, et laissant sans revenu une grande partie de caféiculteurs actuels.

Face à cette situation, combinée à une demande mondiale en augmentation, il est temps de repenser ses habitudes de consommation, allant de pair avec les méthodes de production.

Pour permettre un avenir durable à la filière du café, préserver l’environnement et le maintien d’activités génératrices de revenus, l’agroforesterie est développée au sein des exploitations. Cette technique de culture est alors vue comme une solution pour ne pas arrêter définitivement la culture de café. Mais cela a un coût ! Les petites exploitations ne disposent pas souvent de fonds de trésorerie nécessaires pour acquérir le matériel et développer les itinéraires techniques nécessaires à la transition. D’où l’intérêt de valoriser le prix de vente de ce café sous ombrage.

Que faire, en tant que consommateur, pour soutenir une filière plus durable ?

À la veille d’une crise de raréfaction du café, nous avons tous un rôle à jouer pour que cette boisson aujourd’hui incontournable ne devienne pas un produit de luxe.

Il est dès lors important de soutenir les petits producteurs qui prônent des pratiques agricoles responsables et de meilleures conditions de travail. Des torréfacteurs locaux, comme CloudForest, ont décidé de rejoindre un collectif de torréfacteurs européens, Roasters United, pour réaliser des achats directs de cafés auprès des coopératives produisant uniquement des cafés certifiés bio et qui fonctionnent de manière démocratique.

Soutenir cette filière passe aussi par une juste rémunération des caféiculteurs. Or, le prix du café – côté en bourse – ne cesse d’augmenter avec les stocks qui s’amoindrissent. Bien que le café soit ancré dur comme fer dans nos habitudes, ne vaudrait-il pas revoir notre consommation pour pouvoir encore boire du café dans 20 ans ? Pour cela, plusieurs pistes sont à creuser.

Le café de spécialité*, un café plus durable ?

Avec le mouvement de revalorisation du café, on assiste depuis plusieurs années au développement du café de spécialité. Réputé pour sa qualité supérieure et ses saveurs uniques, le café de spécialité transforme la pause-café en une véritable expérience gustative. Bien que le café de spécialité ne soit jugé comme tel que pour sa qualité, il s’avère qu’il est aussi souvent associé à un café plus éthique. Les torréfacteurs travaillant du café de spécialité mettent un point d’honneur à défendre le développement de l’agroforesterie, un approvisionnement avec des transports moins carbonés (tels que les voiliers-cargo), et surtout une juste rémunération du travail des producteurs. Ils tendent à maitriser l’ensemble de la chaîne, depuis la sélection dans les fermes jusqu’à la vente dans leurs établissements, communément appelés coffee-shops.

Adopter des alternatives au café ?

Si vous ne pouvez vous passer de café, peut-être pourriez-vous vous laisser séduire par une des nombreuses alternatives au café qui ont le vent en poupe actuellement, avec de nombreux bienfaits en plus d’être dépourvues de caféine ! Café d’épeautre, café d’orge, chicorée, café aux champignons, café de sarrasin… On vous propose ici d’en savoir un peu plus sur certaines de ces alternatives.

Depuis des générations, la chicorée occupe une place de choix. Popularisée dans les années 1950 pour proposer une alternative moins forte au café avec un mélange café-chicorée, elle est aujourd’hui reconnue pour ses apports nutritionnels (riches en fibres, lipides, glucides, minéraux, vitamines) en plus d’avoir un impact environnemental moindre. Avec l’émergence de nouvelles marques sur le marché telles que Nourée ou Cherico, en plus des marques traditionnelles telles que Chicorée du Nord et Chicorée Leroux, la chicorée a aujourd’hui le vent en poupe, et pas que dans le Nord.

Le café d’orge a, lui aussi, plus d’un tour dans son sac pour satisfaire les adeptes du café. Fabriquée à partir d’orge produite dans différentes régions en France, cette boisson a tout d’un café : la même apparence quand elle est en poudre, la même teinte et la même épaisseur une fois liquide. À quelques différences près : l’odeur – aux notes subtiles de pain grillé, de caramel et de noisette -, et le goût moins amer. Une fois la céréale cultivée, elle est séchée, mondée, puis torréfiée, avant d’être réduite en poudre : des étapes qui peuvent s’apparenter au processus de transformation du café, d’où les similitudes. À découvrir par exemple chez Potj’café dans le Nord !

Dans cette vague d’alternative au café, on trouve aussi le café de lupin, à base de fleurs, hérité de la Seconde Guerre mondiale alors que le café manquait. Adapté aux mêmes techniques de préparation que notre célèbre café, le café de lupin se prête volontiers à toutes les déclinaisons du café traditionnel : cappuccino, latte, etc. Du café doux au café intense, le café de lupin semble se décliner au même titre que notre bien-aimé café traditionnel. Parmi les pionniers de ce café, on retrouve Lupi Coffee dans le Nord.

Alors, on opte pour quelle boisson ?

Toutes ces alternatives présentent un avantage notable par rapport à l’habituelle tasse de café : un impact environnemental souvent moindre, qui s’explique par des cultures consommant moins d’eau et nécessitant des sols moins fertiles que le café, en plus d’une production locale. Il faut malgré tout garder en tête que tous les cafés n’ont pas le même impact environnemental selon les méthodes de production et de transformation, ainsi que les moyens de transport.

Grâce à la recherche permanente sur le sujet, de plus en plus d’alternatives se rapprochent du café autant dans l’apparence que dans le goût. Malgré cela, il reste difficile de supprimer le café de son quotidien. Certaines alternatives peuvent progressivement prendre place, tout en conservant une consommation de café issu de filière durable, plus respectueux de l’environnement. L’adage de consommer moins, mais mieux, prend ici tout son sens !

C’est ainsi que nous pouvons agir pour soutenir durablement la filière du café, afin de continuer à boire notre petit kawa dans 20 ans.

Allez, on part faire une pause… café ?

*Sur un lot de 350 grammes de café vert récolté à la main sur une même parcelle, un café de spécialité ne doit révéler aucun défaut majeur et pas plus de 5 défauts mineurs – grain immature, brisé ou flétri, par exemple. De même, il doit impérativement dépasser une notation supérieure à 80 sur 100, répartie en 10 critères. Les cafés n’y répondant pas sont appelés cafés de commodité.

Rédactrice : Aline Archelin.